Le mécanisme de filtrage belge des investissements directs à l’étranger (IDE), entré en vigueur le 1er juillet 2023, consiste en une présélection par les pouvoirs publics des investissements réalisés à l’étranger dans des secteurs sensibles. Le Comité de filtrage interfédéral (le « Comité de filtrage ») a été créé pour effectuer ces contrôles préliminaires. Les transactions tombant sous le champ d’application doivent être notifiées au Comité de filtrage avant le transfert des parts. En outre, une obligation de standstill s’applique, ce qui signifie que la transaction ne peut être réalisée qu’après confirmation qu’un contrôle approfondi n’est pas nécessaire ou qu’elle a été approuvée.
Quelles sont les transactions concernées ?
Les investissements à l’étranger ne tombent pas tous automatiquement sous le coup du mécanisme de filtrage des IDE. L’obligation de notification s’applique spécifiquement lorsqu’un « investisseur étranger » est impliqué dans la transaction. Il en est question dans les cas suivants :
- une personne physique dont la résidence principale est située en dehors de l’UE ou ;
- une société constituée en dehors de l’UE ou dont la résidence principale du bénéficiaire effectif (UBO) se trouve en dehors de l’UE.
De plus, une notification n’est requise que si la transaction aboutit à l’acquisition du « contrôle » ou de la capacité d’exercer une influence décisive sur les décisions stratégiques de l’entreprise belge.
Par ailleurs, la transaction doit aboutir à l’acquisition d’au moins 10 % ou 25 % (selon le secteur) d’une entreprise stratégique belge. L’augmentation d’une participation existante au-delà de ces seuils (par exemple de 20 à 25 %) doit également être notifiée. Les fusions, acquisitions et augmentations de capital classiques entrent donc dans le champ d’application du mécanisme de filtrage des IDE.
Quels sont les secteurs visés par le mécanisme de filtrage des IDE ?
La nécessité de notification dépend à la fois du secteur dans lequel la société belge opère et du nombre de droits de vote qui seront détenus par l’investisseur étranger à la suite de l’investissement.
Les secteurs pour lesquels un seuil de 10 % des droits de vote s’applique pour la notification sont la défense, l’énergie, la cybersécurité, les communications électroniques et les infrastructures numériques, à condition que l’entreprise cible ait réalisé un chiffre d’affaires de plus de 100 millions d’euros au cours de l’exercice précédent. Une notification est requise pour les secteurs suivants en cas d’acquisition de 25 % ou plus des droits de vote dans une entreprise belge : infrastructures vitales telles que l’énergie, les transports, l’eau, la santé, les médias, le traitement ou le stockage de données, etc., à condition que le chiffre d’affaires de l’exercice précédant l’acquisition soit supérieur à 25 millions d’euros.
Déroulement de la procédure
L’obligation de notification s’applique aux investisseurs étrangers qui entrent dans le champ d’application ; ils doivent s’adresser au Comité de filtrage. La procédure se déroule en trois étapes.
Phase de notification
Les investissements entrant dans le champ d’application doivent être notifiés entre la souscription et la clôture. Cette notification comprend des informations sur l’investisseur étranger, telles que la structure de l’actionnariat, l’entreprise cible, la valeur estimée, le financement de l’investissement et le secteur ou les activités de l’entreprise cible. Une fois la notification terminée, le secrétariat chargé du filtrage en accuse réception à l’investisseur étranger et poursuit la procédure d’examen.
Procédure d’examen
Le délai pour la procédure d’examen est fixé à 30 jours calendrier à compter de la réception d’une notification complète. Si l’évaluation montre que la transaction ne constitue pas une menace pour l’ordre public, la sécurité nationale ou des intérêts stratégiques, la procédure est clôturée. Si le Comité de filtrage estime que la transaction présente de tels risques, la phase de filtrage est mise en œuvre.
Phase de filtrage
À ce stade, le Comité de filtrage procède à une évaluation approfondie des risques liés à l’investissement proposé et rédige un projet d’avis. En cas d’avis négatif, l’investisseur étranger a le droit de consulter le dossier et le projet d’avis et dispose d’un délai de dix jours pour introduire des remarques par écrit.
Le Comité de filtrage peut finalement (i) approuver la transaction, (ii) approuver la transaction avec des mesures correctives, ou (iii) rejeter la transaction. L’investisseur étranger a le droit de négocier des mesures correctives avec le Comité de filtrage. La décision finale peut être contestée auprès de la Cour des marchés de Bruxelles dans les 30 jours suivant sa notification.
Sanctions et amendes en cas de non-respect
Le Comité de filtrage dispose d’office de pouvoirs significatifs pour évaluer les transactions qui n’ont pas été formellement notifiées. Cette compétence s’étend jusqu’à deux ans après l’acquisition, voire cinq ans en cas de mauvaise foi avérée. Des amendes comprise entre 10 et 30 % de la valeur de la transaction peuvent être imposées en cas de non-respect de l’obligation de notification et/ou de stanstill.
Conclusion
Une vigilance accrue est de mise si vous opérez dans un secteur couvert par le mécanisme de filtrage des IDE, en particulier si vous envisagez d’attirer de nouveaux investisseurs ou si certains de vos investisseurs étrangers souhaitent accroître leur participation. Au cours des négociations, il peut être utile d’inclure une condition suspensive d’approbation de la transaction par le Comité de filtrage, sans partager d’emblée toutes les informations relatives à l’entreprise avec l’investisseur potentiel.
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Cet article a été écrit par Azeddine El Bastani.